Entrevue père-fils: Buddy Ford Jr & Edward Buddy Ford Sr.
- Entrevue Isa More Photos Jesse L.
- 19 oct. 2015
- 9 min de lecture

GMX : Lequel de vous deux a gagné le plus de courses et dans quels sports motorisés?
EBF : À 82 ans, je pense que c’est moi. Ce serait en karting que j'ai gagné le plus de courses, je pouvais courser trois fois par weekend en Ontario, mon lieu de travail. Je gagnais tout le temps car il ne fallait jamais qu'il y en ait un en avant de moi. Je vivais pour courser, j’ai dépensé une fortune pour courser et pour faire courser mon fils Buddy, mais j’adorais ça.
BF : Difficile à dire car on n’a pas gardé de livre des minutes (rires), mais ça doit être sûrement mon père (Dad), qu'on appelle aussi Steady Eddy. Je ne pensais pas qu’il en avait gagné autant. Ce n’est pas un bavard, ni un vantard, il faut lui en parler pour qu’il en parle. C'était une star en Ontario dans le monde du karting. Dad, comme une petite minorité d’amis l’appellent, a commencé à courser en 1951 et il a arrêté en 1969. Il a été champion canadien Go Kart (100cc 2 temps), champion canadien Slot Car (Auto Miniature), champion de la Mauricie en Dirt Track (à plusieurs reprises), champion canadien Road Race (1954). Dans ces quatre disciplines, il a couru partout au Québec, au Canada et aux États-Unis et ceci parfois plusieurs fois par semaine. C’était un mécanicien hors pair, c’est lui qui touchait à toute sa mécanique. Le kart et les motos se réparaient dans la chambre de motel. Parfois, dans ce temps-là, il allait à l’évènement avec la moto avec laquelle il coursait. Il a passé plusieurs nuits, des semaines et même des mois à vivre dans son auto. Moi, je n'en ai pas gagné énormément des courses, mais ma persévérance, mon entrainement et l’aide de mon père m’ont permis d’en gagner quelques-unes, 10 ou 20 peut-être, je ne sais pas, mais pas dans les centaines comme mon père, ou même comme mon fils Shawn. J’ai été Champion Provincial Motocross Junior et Intermédiaire à mes 2 premières saisons et les autres, je ne m’en souviens pas (rires). Supermoto Mayhem at the Morongo, celle-là je m’en souviens, on avait fait un voyage en Californie avec Maxime Sylvestre, Brandon White, Serge Grégoire et Gilles Pepin. C’est comme si j’avais gagné le Championnat du Monde à mes yeux (rires); j’ai battu tous les Vétérans, on devait être trente sur la ligne et la remise des prix était dans le casino après, toute une aventure! Le Motorisé Fun Mover qu’on a ramené au centre de location était du pour un nettoyage, on lavait les filtres dans le lavabo et dans le bain. Quand Grégoire a vu ça, il a dit: On couche a l’hôtel. Un gros merci à Doug Dubach pour le bike et Mike de Factory Connection pour la suspension. Mon prochain voyage de bike sera soit le Baja 250 ou Pikes Peak au Colorado… Sinon, ma victoire à X Town en 2015, c'était tout un feeling.
GMX : Qui de vous deux est le plus fou et pourquoi?

EBF : C'est pas moi (rires)!
BF : Les gens sont souvent jaloux de moi car j’ai l’air d'avoir trop de fun. J’ai parfois l’air d’un extra-terrestre au travail, comparativement à mes collègues, tellement j’ai le sourire collé au visage et que je ne semble pas stressé. Je trouve la vie très belle et j’ai été choyé jusqu'à présent, mais je suis très confiant que le meilleur est encore à venir… WORK HARD, PLAY HARD, Race to Live, Live to Race.
GMX: Quand on est un père et qu'on veut mettre son kid sur une moto, on s'y prend comment?
EBF : Tu paies tout, tu ne lui mets pas de pression et tu lui dis: Enweille gagne!
BF : On prend son temps, on y va pour s’amuser, contrairement à tout ce que j’ai vu. Il faut que cela demeure un sport et un jeu et non un travail ou une corvée. J’en ai vu des parents qui ne l’avaient pas au cours des années, pression par-dessus pression, mêlée à du chialage et à de la critique. Je pense qu’il faut plus encourager que décourager et critiquer. Tu n’arriveras à rien à donner de la merde à quelqu’un. Mes parents ne l’ont jamais fait avec moi, sauf ma mère! Elle me mettait sur les nerfs quand je lâchais le gaz trop de bonne heure sur le start. Il faut que le kid soit libre pour aller faire du bike à partir de la maison ou presque, le pit de sable, la trail, été comme hiver. Une petite track, 4 pieds de large, proche de la maison, ça va faire la job. Le tout accessible de la maison sans trailer va rendre le tout plus facile. Il ne faut pas mettre de pression, pleasure only. Une des choses les plus importantes est que le kid doit pouvoir battre tout le monde avec un bike stock sorti du crate. Les grands du sport ont tous fait ça. No fancy paint job, no trick parts or pipe, just motivation, desire and discipline.
GMX: Chez les Ford, il y a un gène dominant de coureur, mais aussi un gêne de vendeur, est-ce que l'un pourrait aller sans l'autre?

EBF : Les deux, ça aide!
BF : Je pense que l'un peut aller sans l’autre, mais tous les Ford semblent avoir les deux. Pas besoin d’être bon vendeur pour être bon pilote, ce serait mieux d’être un bon mécano je crois. De cette façon, tu peux réparer ton bike et savoir ce qui se passe entre tes deux jambes.
GMX: Buddy voulait aller en politique dans le comté de Repentigny, mais un vieux dossier de 2011 pour possession de marijuana a refait surface... Cela aurait peut-être bien passé chez les Verts (rires), mais pas du tout chez les stricts Conservateurs avec Harper qui durcit toutes les lois au Canada. Quelle a été votre réaction?
EBF : Pas cool ce que le parti a fait, ils avaient un très bon candidat dans les mains.
BF : De la grosse merde. Grosse injustice, c’est comme si le parti s’est servi de moi pour avoir de la visibilité et montrer leur rigidité. Dommage, car je l’aurais gagnée cette élection quand je vois les autres candidats de Repentigny. Sur le coup, cela ne m'a pas fait grand-chose, mais une semaine après, je sentais que tout le monde me regardait et qu’ils le savaient tous. Ce fut une belle expérience, j’ai appris beaucoup, mais je trouve que les perdants c’est le parti conservateur, ils auraient pu me soutenir dans cette situation, je n’ai rien fait de mal, je n’ai pas de dossier criminel, j’ai toujours livré la marchandise et gagné ma vie avec ce qui me sort de la bouche. J’ai été candidat pendant neuf mois et j'ai suivi toutes les formations, vendu toutes les cartes de membres, ramassé toutes les signatures nécessaires et cela a pris quelques minutes à un journaliste pour sortir l’information. Comme si le parti ne pouvait pas faire ça en neuf mois. Ils m’ont jeté dans la gueule du loup je trouve. Trudeau aurait fait un party avec ça. Je ne devais pas être dans le bon parti. J’ai des projets plein la tête, je ne suis pas inquiet et ce qui ne tue pas rend plus fort. J’ai refusé plusieurs entrevues suite à ceci, on m’offrait de venir parler de la situation. J’ai mieux aimé rester professionnel et ne pas dire un mot pour ne pas nuire à la campagne actuelle du parti.
Pour mes parents, cela les a affecté un peu, mais cela ne les empêche pas de m’aimer. Faut foncer et essayer des choses dans la vie, sinon on est un suiveux.
GMX: Buddy nommé en 2012 au Temple de la Renommée de la CMA en même temps que JSR, cela représente quoi pour la famille Ford...?
EBF : Très fier, bel honneur, bien merité!
BF : Très fier et honoré, mais il n'y avait pas juste moi et JSR, il y avait aussi Pierre Corbeil, le fondateur du Supermotocross au Stade Olympique (un de mes patrons dans le temps) et mon patron actuel Alan Labrosse, propriétaire de l’Autodrome de St-Eustache. Belle soirée, je pense que j’ai fait mon speech le plus drôle à vie, la salle a éclaté de rire à quelques reprises et surtout à la fin lorsque Jean Pagé a mentionné: BF si tu veux faire une carrière d’humoriste, t'es bien parti. Merci à mes parents pour m’avoir permis de faire ce que j’aime dans la vie.
GMX: Buddy, 54 ans, arrive à XTOWN comme un cheveu sur la soupe dans le championnat et ravit la victoire dans la catégorie+45. Quel est le secret de la longévité pour un pilote dans le motocross?
EBF : Pas surpris du tout, il est en forme!

BF : La course, c’est 75% entre les deux oreilles que ça se passe. Entraînement, motivation, détermination, pas de pression et s’amuser. À XTown cette année, je me suis surpris moi-même. J’y allais pour le Holeshot et juste pour rouler un heat. Je ne pensais vraiment pas gagner, mais j’avais une bonne moto bien préparée et même à 54 ans, je suis dans une forme comme jamais je n'ai été depuis trente ans. Je m’entraîne en cardio et j’ai une routine d’étirements de yoga et de respirations que je fais religieusement 6 à 7 jours par semaine et parfois 2 fois par jour. J’ai adoré ma journée à XTown, sauf l’attente interminable avant de faire le 2e heat. Trop long, ça tue le sport! Merci à Sébastien Plourde, I was a Factory Rider for a day! Très fier d’avoir battu les gars qui roulent régulièrement, cela faisait des années que je n’avais pas piloté une 450. J’ai pris mon temps, je me suis parlé tout au long de la course, respiré beaucoup et boom ça a marché!
Faire du bike, c’est ce que j’aime faire le plus au monde, j’aurais de la misère à choisir si on me proposait une chose entre deux avant de mourir: Faire l’amour avec la femme de ton choix ou faire la course de ton choix? Let's Go Racing (rires)! Vous voulez que ça dure? Arrangez vous pour avoir du fun, vous entraîner, car on ne fait pas du bike pour devenir en forme, faut être en forme pour en faire. On dit que le trouble en moto est situé 18’’derrière le guidon. Alors le Throttle control est très important. J’ai suivi des cours de moto partout et j’ai lu beaucoup. J'ai regardé, j'ai analysé, j’ai enseigné. Je pense être un excellent coach pour peu importe le pilote qui veut apprendre les trucs essentiels pour sa survie et la victoire. Disponible aussi et j’ai le goût de transmettre ma passion.
GMX: Parlons promotion des courses de motocross, parlons de faire revenir les spectateurs aux courses provinciales et nationales, parlons de publicité et de moyens, parlons des promoteurs et des commanditaires. Comment faire revivre le sport dans les médias? Sommes-nous nés pour un petit pain, même dans notre sport?
EBF : Ça prend des bons coureurs, des bonnes courses, des belles tracks et un bon show!
BF : Présentement, le sport n’est pas en top shape. L’économie et la direction que les courses au Québec ont choisi font en sorte qu’il y a un gros travail à faire. Je verrais ça comme des toasts brulées des deux bords présentement. Oui, il y a une solution et non, on n'est pas nés pour un petit pain. On créée notre propre succès, on sème ce que l’on récolte. Pour ma part, j'ai trop voulu faire plaisir, j’ai fait l’erreur d’écouter les promoteurs et les parents pour ajuster le tout comme ils le voulaient et comme ils le suggéraient. J’aurais du continuer à m’écouter, ainsi que les Jean-Marc Benoit de ce monde, et poursuivre dans la même veine, comme disaient certains de mes amis. Je ne cache pas un intérêt pour un éventuel retour. À suivre…

Tout le monde est trop concentré sur son petit monde (il est là le petit pain), au lieu de voir le gros portrait. Il faudrait repartir à la base. Présentement, il y a beaucoup trop de catégories, on dirait que tout le monde à sa catégorie personnelle pour finir top 5. Les courses ne sont pas assez orientées vers le spectateur et vers le public. Pas évident d'aller voir une course et de voir passer des 65cc, des 85cc, des Débutants et des Femmes en pleine après-midi. Ça fait long à regarder et ce n'est pas trop spectaculaire. Je n’ai rien contre les catégories mentionnées ci haut, faut juste arranger l’horaire pour que le public voit les classes les plus rapides. J’ai adoré mes années de promotion et à la direction de la CMRC Québec. Un gros merci à Julie Pominville, Jean Marc Benoit, René Trottier et tous les autres qui se sont impliqués de près ou de loin. J’en ai formé des pilotes, staff, officiels, animateurs et j’ai eu beaucoup de plaisir a le faire. I don’t regret a minute of it.
GMX: Faire de la dirt track sur la terre battue dans un ovale en Harley en 750cc, c'est l'idée de qui? Vous nous expliquez un peu le concept?
EBF : C’était une course populaire à Trois-Rivières et j'ai decidé d’embarquer et j’ai gagné!
BF: La passion est venu de Steady Eddy. Le Dirt Track était très à la mode dans les années 50, 60 et 70. Y’a pas beaucoup de meilleur feeling que de faire déraper une moto sur le côté à 140 kmh. C’est assez spécial de contrôler la slide avec le throttle. Nice sport!

GMX: Quelle est votre idole?
EBF : Dick Klamforth.
BF : 1- Mon père, 2- Bob Hurricane Hannah, 3-Ross Rollerball Pederson, 4- Springer.
Mon père m'a parlé un peu de son père, wow c’était touchant. La passion des Ford vient de lui, de John Ford. Il est décédé d’une crise du cœur en pelletant la neige dehors à l’âge de 50 ans. Mon père pense que c’est la maladie des courses qui l'a mené à cet ACV. Il n'en dormait pas. Lorsque mon père était à l’hôpital pour une blessure, son père lui disait: Tu ne courseras plus jamais mais aussitôt sortis, il lui parlait du prochain weekend.
Durant la nuit, il rentrait dans le garage de son père, empruntait sa moto, allait chercher ma mère qui sortait par la fenêtre et ils roulaient toute la nuit et il ramenait la moto à 5 ou 6 heures du matin, pour pas que le paternel ne s’en aperçoive. Son père ne lui en a jamais parlé, mais il est pas mal convaincu qu'il le savait (rires).
Merci Famille Ford et bonne continuation!
Clin d'oeil à Gino Reda, ami fidèle de Buddy Ford.